Au 21e siècle, rien (ou presque) n'a changé...
« ARCHET : C’est
un petit instrument dont se servent les musiciens pour frotter les cordes du
violon, de la quinte et de la basse, et les faire vibrer. Il est formé de
quatre parties : la baguette, la hausse, la vis et le crin.
La tige ou baguette
est faite en bois très dur, tel que celui du Brésil, de corail, de fer, de
perdrix ; on préfère le premier, qui a la résistance et l’élasticité convenables, sans être trop
lourd. Cette tige se taille d’abord en baguette longue équarrie, dont le bois
est de droit fil ; on l’arrondit ensuite en cylindre, ou plutôt, en long
cône tronqué, en sorte qu’elle soit plus menue à la tête. On a eu soin de
laisser à ce bout un petit tasseau qui s’élève d’environ deux centimètres le
long de la tige, et fait corps avec elle, étant taillé dans le même morceau de
bois. (V. fig. 3, pl. III des
Arts mécaniques.)
La baguette a environ
7 décimètres de longueur et 8 millimètres d'épaisseur au milieu; celle de la
quinte est un peu plus épaisse, et celle de la basse a jusqu'à un centimètre de
diamètre. Ces dimensions varient au goût de l'artiste, et d'après la force des
cordes qu'il doit attaquer. Le bout opposé à la tête est plus épais et façonné
en prisme à 4 ou 6 pans, percé dans sa longueur d'un trou ou canal pour y faire
entrer la vis; il l'est aussi latéralement d'une fenêtre qui communique avec ce
canal pour recevoir l'écrou de la hausse.
La hausse est une petite planchette
d'ébène de 3 à 4 centimètres de long sur 2 de large
environ; l'un des bords porte un écrou qui y est vissé, saille à sa surface,
et entre dans la fenêtre dont on vient de parler. Une vis de 5 à 6 centimètres de long a pour tête un petit cylindre
d'os, d'ivoire, ou de métal, avec lequel elle fait corps. On conçoit que cette
vis entre dans le canal, va mordre dans l'écrou de la hausse, la retient
dressée debout perpendiculaire à la face de la baguette, et la fait avancer ou
reculer à volonté, parce que cette tête prend son appui sur l'extrémité de la
tige.
On ménage une petite
fossette carrée sur la face de la tête, et sur celle de la hausse, pour y
recevoir et retenir les deux bouts du crin. Celui-ci est un écheveau d'environ
150 brins d'égale longueur (à peu près 6 décimètres) ; on préfère les crins
blancs: ceux de la queue du cheval ont seuls la longueur convenable. Les brins ne doivent pas être mêlés ni
entre-croisés. Après les avoir réunis en l'un de leurs bouts, on les lie
fortement avec un fil, et on brûle ce qui dépasse, après l'avoir frotté de
colophane. Il en résulte une crispation et une agglutination de substance qui
forme une sorte de bouton plus gros que le calibre du nouet, et les brins ne
peuvent plus glisser dans leur longueur pour en sortir. Lorsqu'on a fait un
semblable nouet à l'autre bout, en ayant soin que les crins restent parallèles
entre eux, et d'égales longueurs, il ne faut plus que les attacher d'un bout
sur la hausse et de l'autre sur la tête. A cet effet on entre le nouet dans la
fossette qu'on a ménagée, et on le force à y rester par un petit morceau de
bois de grandeur convenable, taillé en biseau, et faisant l'office de coin.
Lorsqu'on tourne la vis, l'écrou monte dans sa fenêtre, éloigne la hausse de la
tête, et donne à l'écheveau de crins la tension qu'on désire ; ces petits coins
de bois ont leurs biseaux opposés à la direction selon laquelle cette tension
s'exerce, dans le sens de la longueur de l'archet. Le
crin a d’abord été frotté d'huile, et essuyé,
pour en ôter les impuretés, puis savonné: comme, dans cet état, il serait trop
gras pour frotter sur les cordes et en tirer des sons, on l'enduit de colophane
en poudre chaque fois qu'on en veut faire usage.

Du reste, il y a un
art particulier pour faire les archets, leur donner le poids convenable, les
décorer d'ornements en nacre ou en métal, choisir le bois pour qu'il ne se
déjette pas, etc. Souvent on voit des archets dressés au feu qui, par l'usage,
se déforment au point de se fendre ou de se courber dans le sens latéral,
défauts qui les font rebuter.
Ceux que Tourte
exécute sont très estimés. Lafleur en fait aussi d'excellens. Les amateurs
mettent un haut prix à cet instrument lorsqu'il remplit toutes les conditions
désirées, et un bel archet se paie jusqu'à 150
francs. On doit avoir soin de détendre un peu le crin chaque fois qu'on ne se
sert pas de l'archet, et alors la baguette ne doit pas
être droite, mais légèrement cambrée dans le plan et tout le long du crin;
cette courbure doit être telle qu'elle disparaisse quand on roidit le crin. On
remarque qu'un archet qu'on laisse
long-temps sans usage, perd peu à peu ses crins, qui se cassent vers leurs
points de flexion, aux coins qui les retiennent dans les fossettes: en
détendant l'archet, on retarde cet effet. Il est du
reste bien aisé de remettre un écheveau de crin lorsque cela est devenu
nécessaire. (V. fig. 3, pl. III
des Arts mécaniques.) Fr. »